Si plusieurs pays à travers le monde ont reconnu, dans leur constitution, l’égalité entre femmes et hommes des droits au sol, à la propriété et au logement consacrée par le droit international, d’après l’ONU-Habitat, il existe toujours un réel écart sexiste dans notre monde contemporain. Sybille Gollac, sociologue et co-autrice de l’ouvrage Le genre du capital, démontre dans son étude « Le patrimoine immobilier, une analyse du genre de la propriété », que quasiment 15% des résidences principales sont détenues par des ménages avec des parts inégales (soit exclusivement par l’un des conjoints ou par l’un des conjoints majoritairement). Ces répartitions sont à l’avantage de l’homme dans 10% des cas, alors qu’elles sont à l’avantage de la femme dans seulement 4,7% des cas. Puis, Alexandre Fitussi, fondateur de Beanstock, une plateforme d’investissements locatifs qui permet d’acheter et de gérer des logements de façon 100 % numérique, constate que les femmes sont largement sous-représentées dans l’investissement locatif en France. Elles ne représentent qu’un tiers des bailleurs si on inclut celles qui investissent en couple, un rapport qui descend à un cinquième si on considère les femmes qui investissent seules.
La Woman Mag s’est interrogée sur ces études et elle livre ses recherches à partir d’expertises sur le sujet. Deux difficultés s’avèrent majeures pour l’accession des femmes à la propriété foncière, montrant un écart béant entre hommes et femmes : le financement et l’héritage immobilier.
Des financements inégaux pour les hommes et les femmes
Le premier obstacle rencontré par les femmes est l’accès au crédit pour financer un bien immobilier. D’après la sociologue Sybille Gollac, elles se trouvent contraintes à constituer un apport personnel plus important (en moyenne de 10% plus élevé que les hommes) et obtiennent des taux d’intérêt plus élevés (1,79% vs. 1,60% pour les hommes) pour des sommes empruntées plus faibles. Les organismes préteurs, plutôt frileux, prennent souvent en compte le risque plus probant pour la femme d’un arrêt d’activité temporaire dû à des congés parentaux, à des congés pour enfants malades, etc. Ces arrêts exceptionnels peuvent plus ou moins se prolonger dans le temps et se répéter. Il est aussi à noter que les couples avec enfants ont plus de facilité à accéder à la propriété que les familles monoparentales, d’après un article de l’Institut National d’Études démographique de 2018.
Conseils des experts de La Woman Mag :
Toutefois, il est tout à fait possible qu’une femme emprunte seule dans le cadre d’une acquisition immobilière. Quelle que soit sa situation, seule au foyer, avec ou sans enfants, la banque évalue les revenus mais aussi les charges pour calculer la capacité à emprunter. Ce calcul permet une première étape d’estimation de la faisabilité d’un prêt immobilier. En France, il est possible de s’endetter à hauteur de 33% de ses revenus. Cela signifie donc que l’on peut consacrer jusqu’ à un tiers de ses revenus au remboursement de mensualité et la femme peut faire valoir ses droits.
Pensez également aux courtiers qui sauront trouver les meilleures opportunités. Véritable intermédiaire, le courtier analyse les besoins de son client, le conseille et le guide dans ses droits et ses démarches administratives.
Enfin, notons que la femme fonctionnaire aura toujours plus de facilité à emprunter que celle ou celui qui travaille dans le secteur privé. Dans un couple, la situation de la femme fonctionnaire sera davantage prise en compte que celle de son compagnon travaillant dans le privé. La sécurité de l’emploi est un gage pour l’organisme prêteur.
Des héritages immobiliers moins favorables aux femmes
Le deuxième facteur qui réduit les chances des femmes à accéder à la propriété est la tradition discriminatoire de l’héritage foncier. Sybille Gollac et Céline Bessière dénoncent dans le Genre du capital, que les familles en France continuent à « composer » avec la loi grâce à des arrangements intrafamiliaux qui défavorisent les femmes dans les héritages reçus. Une des raisons majeures alors évoquées est le manque de compétence de la part des femmes à savoir faire fructifier le patrimoine familial. Céline Bessière confie au rédacteur Pierre Januel : « Les personnes trouvent souvent un arrangement auquel elles souscrivent de plus ou moins bonne grâce. Les héritières sont souvent d’accord sur le fait que certains biens doivent rester dans la famille et que leur frère est le mieux placé pour les conserver. Mais elles voient bien que leur part a été sous-évaluée. Elles acceptent l’idée que les hommes sont porteurs d’un rôle spécifique et que leur réussite est primordiale, mais cela ne va pas sans douleur. Les femmes font tout un travail pour « ne pas se fâcher », et le souci de transmission fait qu’elles acceptent ces consensus. Et les notaires ne le remettent pas en cause”.
Conseils des experts de La Woman Mag :
Mais là encore, les femmes ont la possibilité de se faire assister et conseiller dans l’accession à la propriété, suite à un héritage immobilier.
Le conseil supérieur de notariat a créé des centres de médiations qui permettent de débloquer des situations concernant le droit de la famille, tout en offrant des solutions rapides et à moindre coût. Grâce au dialogue, le médiateur propose des décisions raisonnées, facilitant l’anticipation des conflits ou une sortie de crise, mettant en évidence les intérêts et les besoins de chacune des parties. Il s’agit d’une alternative pour apporter un nouveau service avec des propositions plus justes.
Vous pouvez aussi songer à vous entretenir avec les agents des offices notariaux qui « procurent des conseils et des solutions équilibrées et incontestables » selon le rapport annuel des notaires de France de 2020. Ils sont en parfaite mesure de prodiguer les textes de loi et le cadre juridique liés à votre situation et de vous informer de vos droits pour mettre à mal les traditions patriarcales en matière de gouvernance foncière.
Pour résumer, suffisamment dirigée et accompagnée par des professionnels, chaque femme verra ses projets facilités, dans l’accès à la propriété, quelle que soit sa situation. Le rêve de devenir propriétaire est, en conséquence, accessible aussi bien aux hommes qu’aux femmes, à condition de se battre un peu.