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Faut-il tout dire aux enfants ?

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En temps de crise, cette question revêt une toute autre couleur : doit-on tout dire à nos enfants ? Doit-on tout leur expliquer ?

 

La place des enfants au sein des familles a évolué et continue son évolution. Le discours des parents au sujet de la communication à leurs enfants alterne bien souvent entre deux positions opposées : tout expliquer au regard des avancées sur l’importance de verbaliser à l’enfant ou, au contraire, ne rien dire pour les préserver, ne pas les heurter. Alors, quelle position adopter ?

 

 

Plutôt qu’une méthode pour expliquer la crise sanitaire ou les sujets tabous aux enfants, il s’agira dans cet article de vous apporter des bases de réflexion pour votre situation individuelle.

 

 

Faut-il tout dire aux enfants ?

 

Arrêtons-nous un instant sur le titre qui introduit cet article pour élaborer notre réflexion.

Lorsque l’on dit : « tout dire », de quoi parle-t-on ? Dans notre société où l’accès à l’information est instantané et immédiat, dans un Monde où nous sommes envahis d’info et d’intox en permanence par le bruit incessant de nos notifications, que transmettre aux enfants et comment les préserver ? Dans une ère où notre rapport à l’intimité a évolué, que disons-nous à nos enfants et que réservons-nous pour notre jardin intime ?

 

 

« Faut »-il, « doit »-on, comme si finalement il y avait une injonction, mais surtout une bonne façon d’être parents ou même encore une méthode applicable à tous. Alors pourrait-on abaisser cette exigence parentale ainsi, en ouvrant le champ des possibles : peut-on tout dire à nos enfants ?  Et, surtout, que peut-on dire à nos enfants dans le respect de leur développement psychologique et affectif, mais aussi dans le respect de notre personnalité et nos limites de parents, tenant compte de notre fonctionnement familial ?

 

 

 

 

Deux principes essentiels sur l’enfant à avoir en tête en se posant ces questions :

 

  • 1er principe: les enfants, quel que soit leur âge sont des éponges à émotions, ils perçoivent de façon très fine le non verbal. Un silence qui masque le poids d’une souffrance, une intonation laissant transparaître une angoisse, un mot prononcé plutôt qu’un autre par peur de blesser : tout cet implicite est reçu de façon brute par l’enfant. Le cerveau émotionnel étant mature aux alentours de 25 ans, l’enfant n’a pas toujours les mots pour décoder ce qu’il perçoit. Alors, il ressent sans pouvoir nommer ni comprendre les émotions brutes. Le rôle du parent va alors être de traduire ce contenu brut ;

 

  • 2e principe: quel que soit leur âge et les relations parents-enfants, l’enfant se construit dans le regard de ses adultes tuteurs. Ses actes sont tournés vers l’idée de faire plaisir à ses parents (ou adultes de référence). Ainsi, face aux non-dits et face aux conflits non explicites, l’enfant va avoir tendance à porter la responsabilité de ce qu’il perçoit, si le contexte ne lui est pas expliqué.

 

 

Alors finalement, que peut-on dire à nos enfants ?

Nous avons vu que les enfants sont des éponges à émotions et qu’ils ont tendance à se sentir responsables de ce qui se passe dans leur famille. Leur parler est donc essentiel, mais pas de tout et pas de n’importe quelle façon.

 

Proposons ici quelques principes fondamentaux (non exhaustifs) qui vous guideront dans la communication avec vos enfants :

 

Le juste milieu entre tout dire ou ne rien dire :

 

  • Il n’est nul besoin de tout dire à votre enfant et il est important que vous conserviez un jardin secret.

 À l’inverse, tout leur cacher pour les préserver peut s’avérer plus néfaste que de leur expliquer avec des mots accessibles ce qui les concerne.

 

Le non-dit va laisser la place à l’imaginaire de l’enfant et pourra susciter davantage d’angoisses. Il est en position de savoir ce qui lui arrive, ce dont il est témoin et ce qui le concerne pour saisir son environnement. Un enfant vit mieux ce qu’il comprend.

 

  • Il n’existe pas de « bonne façon » de dire les choses. Tout est une question de bon sens et il y a un juste milieu à trouver entre tout dire sans filtre ou ne rien dire du tout.

 

 

Comment dire ?

 

  • Bien sûr, dans toute situation, le discours et les mots sont choisis et adaptés à l’âge et à la maturité de l’enfant. Par exemple, expliquer votre avis sur la situation sanitaire ou le port du masque à votre enfant ne se fait pas comme vous le feriez avec un adulte. De la même façon, vous ne l’expliquerez pas de la même façon à un enfant de 3 ans ou de 10 ans.

 

L’enfant n’a pas besoin de tous les détails pour être rassuré. Il a besoin d’écoute, de disponibilité, de mots vrais, justes et sincères.

 

  • Quoiqu’il arrive, l’enfant a donc besoin de vérités. Plutôt que de mentir, on clarifie nos idées avant de parler à l’enfant et on choisit de dire uniquement ce qui semble accessible à sa maturité.

 

À quel moment dire ?

 

  • Le contexte est tout aussi important que les mots choisis. Un moment de disponibilité du parent et de l’enfant est essentiel pour favoriser une bonne communication, quitte à différer le temps d’échange. Selon le sujet, un moment d’intimité hors de tout regard peut même s’avérer  nécessaire.

 

  • Le parent est au clair avec ses idées, son point de vue et ses émotions avant d’en transmettre quelque chose à son enfant. Il est à l’aise avec le sujet ou du moins il accepte et assume son malaise quitte à différer sa réponse en le verbalisant à l’enfant.

 

  • La place de confident n’est pas celle de l’enfant. Si le parent est débordé ou dépassé par une situation, se confier à un autre adulte en amont permet d’éviter cela.

 

 

 

Quoi dire ?

 

  • Les interrogations de l’enfant sont un bon indicateur de ce qu’ils sont en capacité d’entendre concernant les sujets sensibles : la mort, la sexualité, la maladie, etc. « L’enfant ne pose pas des questions dont il ne peut pas entendre la réponse », nous dit Serge Tisseron, pédopsychiatre.

 

 

  • Lorsqu’un sujet vous est tabou, il pèsera lourd pour votre enfant, il va ressentir l’interdit d’en parler et il va craindre de vous blesser s’il en parle. Au contraire, si vous parvenez à évoquer un sujet sensible comme faisant partie intégrante du cycle de la vie, votre enfant va pouvoir se construire, se libérer des inquiétudes et surmonter de façon plus fluide la douleur associée à une situation problématique.

 

Face à un tabou ou un interdit, le corps peut exprimer ce qui n’a pas été formulé par des mots, en développant des symptômes physiques (comme l’eczéma, par exemple).

 

  • Lorsque des sujets ne concernent pas directement votre enfant, mais que vous êtes affectés par la charge émotionnelle associée à une situation, la relation à votre enfant sera teintée de ce fardeau. Dans ce cas, il est essentiel de poser des mots sur vos émotions en ayant clarifié au préalable vos ressentis. Cela évitera que votre enfant se sente responsable de votre mal-être.

 

 

Enfin, nous finirons par évoquer la notion d’authenticité pour aiguiller les parents qui lisent cet article. Osez être authentique avec vos enfants sur votre incapacité à répondre à toutes leurs questions et n’hésitez pas à y revenir plus tard lorsque vous êtes au clair, et surtout, plus calmes et apaisés émotionnellement. Authenticité n’est donc pas transparence, il n’y a aucune injonction à tout dire aux enfants et le jardin intime du parent est salvateur pour lui-même, autant que pour son enfant.

 

 

Concluons ainsi par les mots éclairants de Philippe Grimbert, psychanalyste : « la parole soigne, elle libère, peut-être même mieux que soigner, elle guérit, et peut-être même mieux que guérir, elle sauve ».

 

 

 

 

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