Sabrina Wadel, femme de santé
Fraîchement nominée au quatrième Trophée des Femmes Précieuses dans la catégorie femme de santé, Sabrina Wadel est sans doute l’une des cadres dirigeantes du milieu hospitalier les plus bienveillantes de la Réunion. Elle déclare dans son interview pour La Woman Mag : « Cette récompense, je la partage et la dédie aux femmes des hôpitaux pour leur rendre hommage, quels que soient leur fonction et leur poste ».
Sabrina est une femme à qui le succès sourit à force de discipline et d’ambition dans le bon sens du terme. D’origine alsacienne, elle enchaîne des études diplômantes. Elle fait une licence de langues étrangères par intérêt pour les relations internationales en vue de s’orienter vers la diplomatie. Puis elle entre à Sciences Po et passe des concours dans la haute fonction publique. Elle débute sa carrière en tant que directrice de la sécurité sociale à Toulouse avant de s’installer à la Réunion avec son compagnon en 2010. Elle accède à un poste de direction à la Réunion au sein du régime social des indépendants. Depuis 2014, elle occupe des fonctions de directrice d’hôpital au sein du CHU et du GHER (groupe hospitalier Est Réunion), et depuis près de deux ans de Secrétaire Générale du CHU et du GHER. En 2011, elle donne naissance à son fils. Malgré la charge de travail qui accapare le temps de la jeune dirigeante, elle arrive à concilier sa vie familiale. Elle notifie : « mon conjoint m’a toujours soutenue avec le partage des rôles ». En 2019, elle est nommée experte en santé et protection sociale auprès de l’Union Européenne, en tant qu’appui international. Elle apporte ses expériences en matière de politique de santé publique et humblement elle dit apprendre aussi des autres.
Sabrina Wadel est également engagée dans la lutte contre les violences sexistes qui passent souvent par des violences verbales entre professionnels. Toutefois, elle avoue que de par ses fonctions et sa position de cadre, elle est épargnée et ne s’est jamais sentie menacée, malgré parfois de petites allusions agaçantes comme sur sa tenue vestimentaire. Elle livre pour La Woman Mag une anecdote plutôt cocasse en s’exprimant ainsi : « Lors d’un congrès, au début de ma carrière, les directeurs présents se sont adressés à mon adjoint en m’ignorant. Les directeurs sont allés directement vers lui parce que c’était un homme et qui plus est, plus âgée que moi. J’ai senti mon adjoint mal à l’aise avant qu’il explique qui j’étais. Cette situation m’a amusée quand ils se sont aperçus que j’étais la directrice ». Toutefois, elle confie : « Les hommes ont été pour moi plutôt soutenants et ils m’ont énormément appris à oser et à m’affirmer ». C’est notamment son directeur qui lui a confié la mission de directrice du fonds de dotation récemment créé par le CHU. Elle explique ce projet, qui lui tient particulièrement à cœur, ainsi : « Il permet de rendre la vie plus agréable au personnel soignant et aux patients grâce à une programmation culturelle comme des expositions temporaires, des concerts, une bibliothèque, etc.
Ce projet contient également un volet sur le développement durable, l’hôpital étant un très gros consommateur de déchets et ouvert H/24. Un autre volet est consacré au domaine sociétal, notamment en direction des personnes porteuses de handicaps et enfin un volet sur l’égalité hommes/femmes ». Elle poursuit son propos sur ce dernier volet en pointant du doigt les différences sexistes dans le domaine professionnel en expliquant : « Les inégalités femmes/hommes existent à l’hôpital comme dans tous les autres domaines. Avec une majorité de femmes à hauteur de 70 % dans le domaine du soin, de 50 % chez les médecins et 60% chez les cadres, il existe toujours une inégalité salariale, des temps partiels plus caractéristiques chez les femmes ou qui arrêtent leur carrière précocement à cause des enfants ». Elle ajoute : « Pour éviter le sexisme, il faut éduquer les enfants. Moi je refuse les propos genrés de mon fils ». Elle a pour modèle Simone Veil et Gisèle Halimi qui ont milité pour l’émancipation de la femme, notamment par le droit à l’éducation et l’indépendance financière. Elle déclare ; « Il ne faut pas croire que ce sont des combats qui appartiennent au passé. Par exemple, aux États-Unis, dans certains états, on remet en cause le droit fondamental sur l’avortement et je pense que c’est super inquiétant… Il faut des associations pour défendre nos droits, mais je ne suis pas partie prenante de certaines organisations militantes ».
Sabrina Wadel termine l’interview en conseillant aux dirigeantes en devenir de se former et de bien s’entourer, même si la réussite reste individuelle. Elle explique : « Il existe aujourd’hui beaucoup de formations et des groupes autour de l’entrepreneuriat au féminin. Même dans le domaine de la santé, il existe des associations comme l’organisme national Femmes de Santé, qui compte 2000 ou 3000 femmes, qui a vocation à organiser des évènements et des espaces de réflexions autour de la place de la femme au sein des établissements de la santé ou encore l’association Donner des Elles à la santé. Les femmes sont donc bien entourées, contrairement à l’époque où j’étais encore en études, on avait uniquement nos syndicats ». Elle poursuit : « Mais il faut se méfier de rester qu’entre femmes ; il faut irriguer au contraire la société avec les hommes qui ont encore une grande place de pouvoir ».
Sabrina Wadel est une femme passionnée par son métier avec de hautes responsabilités, mais qui sait rester modeste. Elle porte un regard bienveillant sur tous ses collègues et n’hésites pas à rendre hommage aux hommes qui l’on aidée dans sa carrière. Pour elle, le facteur « chance » n’existe pas ; il faut oser et entreprendre.